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Vinha Grande: classique et chic

Avez-vous entendu parler d’un vin mythique nommé Barca Velha ? Créé en 1952, il est souvent considéré comme l’égal du Vega Sicilia espagnol. Le sommet de ce que le Portugal propose en vin rouge sec.

Ce Barca Velha n’est commercialisé que dans les meilleurs millésimes: sauf erreur, le millésime le plus récent est 2011. Le 2008 et le 2004 ont également été élaborés. A mon grand regret, je n’ai jamais eu l’occasion de vérifier si le mythe est à la hauteur des attentes. Vu le prix demandé pour les rares bouteilles disponibles (plusieurs centaines d’euros), ce n’est pas vraiment surprenant.

Le Domaine qui se cache derrière Barca Velha, c’est la Casa Ferreirinha dans le Douro. Gamme large, dans toutes les catégories de prix, du petit vin sans prétention à la cuvée de luxe. Mettre la main sur le meilleur rapport qualité/prix est un exercice amusant. A ce petit jeu, c’est la cuvée Vinha Grande qui tire le grolleau *.

*: Jeu de mots de type ampélographique, qui tente de faire sourire le lecteur en mélangeant allègrement le gros lot et le cépage ligérien homophone. Bon, pouf-pouf, revenons-en à notre Vinha Grande.

Vinha Grande 2018 est un vin classique, dans le meilleur sens du terme. Il évoque tant St-Emilion que la Rioja. Robe dense, avec des reflets violacés. Il y a du café, des épices et du jambon fumé qui complètent le grand fruit (prune). Le style est plein, rond et savoureux. Tant l’alcool (14%) que le boisé (barriques usagées pendant 12 mois) sont gérés avec maestria. Belle finale, longue et harmonieuse. Vin en demi-puissance, qui trouve le bon équilibre entre concentration et buvabilité. Si dégusté jeune, je suggère un passage par la case « carafe ».

Cépages ? Un classique de la région assemblant tinta roriz, touriga franca, tinta barocca et touriga nacional. Je me souviens d’une époque où le Douro a tenté de se faire une place sur le marché des vins mono-cépages, mais ce n’était vraiment pas en ligne avec la tradition locale.

Je pense que ce vin, un peu cachotier, est capable de se faire passer pour un membre de la famille des liquides prestigieux qui se négocient à un prix bien plus élevé. Autrement dit, Vinha Grande vous en donne pour votre argent.

Pour l’anecdote, le Domaine fournit une information, habituelle voire obligatoire dans l’alimentaire mais plus que rare dans le monde du vin: un verre de 10 centilitres contient 85 kilocalories. Oubliez rapidement ce que vous venez de lire…

Casa Ferreirinha Vinha Grande 2018 est disponible dans le magasin.

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Drink Me: 1 litre de plaisir

Je connais des vins subtils, changeants, un poil compliqués. Ils se révèlent progressivement, jouent avec le dégustateur pour l’amener d’abord sur une fausse piste, évoluent jusqu’au lendemain. J’aime bien ça, parce qu’on ne s’ennuie pas.

Aujourd’hui, virage à 180 degrés: Drink Me, 1 litre de plaisir. Pas compliqué pour un sou, extrême buvabilité, léger et peu extrait. Le rouge qui se sert un peu frais et qui régale les amis, par une belle journée du mois de mai (les amis en avril …ce n’est pas gagné…).

1 litre de plaisir vous regarde dans le blanc des yeux !

Dirk Niepoort a donc encore une fois frappé. Le Portugais qui crée de nouveaux projets dans le vin plus vite que son ombre dégaine cette fois un flacon original, en format 1 litre. Ou 100 centilitres, pour montrer que c’est beaucoup. Je parie que ces grandes bouteilles seront vides avant un tas de bouteilles de 75 cl.

Région: Bairrada, dans le centre du Portugal. Cépage: 100% baga, vignes de 40 ans et plus, certaines étant centenaires.

Grand fruit frais, joli floral, très peu de tannins, ça glisse comme un toboggan bien huilé. Couleur lumineuse, plutôt légère. Fraîcheur, équilibre, alcool modeste (12%). Longueur joyeuse, sur la cerise et la fraise. Un verre appelle le suivant. Heureusement, la bouteille s’y prête !

Fermentation et élevage en cuve inox (pas de passage en bois). Macération carbonique.

Dirk Niepoort himself

Remarque à l’attention des membres du club très « select » des amateurs de vrai baga. Vous avez raison, le 100% baga décrit ci-dessus ne correspond pas à l’image traditionnelle de ce cépage, proche de nebbiolo piémontais ou du xinomavro grec. Les vins de baga sont souvent fort tanniques, avec une certaine sécheresse pendant leur jeunesse: ce sont alors des vins qui bénéficient d’une garde de plusieurs années et/ou d’un vigoureux passage en carafe. Dirk Niepoort s’amuse à montrer et à démontrer que ce cépage est donc polymorphe et qu’il s’exprime avec autant de bonheur dans un registre beaucoup plus accessible !

Et le prix ? Cohérent, c’est-à-dire accessible. € 15,50 pour un litre, soit l’équivalent de € 11,50 la bouteille de 75 cl.

Drink Me est à présent disponible dans le magasin.

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colis 6 bouteilles: découverte du Portugal

Pour découvrir différentes régions (Dão, Douro, Vinho Verde, Açores, Bairrada) et différents cépages (touriga nacional, bical, alvarinho, jaen, arinto, …).

Plus d’information sur les vins qui composent le colis dans mes « articles géologiques »: Schiste, Granit, Lave et Calcaire. Voir aussi: Rotulo.

Ce colis de 6 vins portugais est disponible dans le magasin.

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Calcaire

Après schiste (Luis Seabra), granit (Soalheiro) et lave (Ilha di Pico), nous continuons notre exploration géologique du Portugal via la région de la Bairrada, qui se caractérise par un sous-sol à dominante calcaire.

La Bairrada est sortie d’un relatif anonymat par la grâce de Luis Pato, vigneron visionnaire, qui en a fait tant et plus pour faire connaître et reconnaître le cépage local (noir) baga. Ce cépage pourrait être rapproché du nebbiolo piémontais et du xinomavro grec: tannique et acide, avec un sens de l’humour limité. Une sorte d’antithèse du merlot. Si vous adulez le St-Emilion à 15% enrobé par la sucrosité de la barrique, je vous recommande une extrême prudence face à un verre de baga: un incident dramatique ne peut être exclu.

Trêve de plaisanterie, Luis Pato a eu une autre bonne idée, celle d’engendrer une fille à qui il a transmis sa passion. Filipa Pato incarne à son tour la Bairrada en rendant également leur noblesse aux cépages blancs de la région, en particulier bical et arinto.

William & Filipa

Poursuivons dans les aventures familiales pour indiquer que Filipa Pato a épousé William Wouters, lui-même connu des plus anciens d’entre nous en tant qu’ex-patron du restaurant à vins anversois, le Pazzo. Le restaurant existe toujours et mérite assurément une visite, du moins lorsque les circonstances le permettent.

Géographiquement, la Bairrada c’est le centre du Portugal, entre Porto et Lisbonne, pas loin de la ville universitaire de Coïmbra et surtout pas loin de l’Océan Atlantique. Entre l’océan et les collines où pousse la vigne, une plaine, ce qui maximise l’influence atlantique, en l’absence d’obstacles. C’est donc une zone modérément chaude, la latitude étant en quelque sorte compensée par la brise marine.

La gamme proposée par Filipa et William est large et audacieuse, qualité et notoriété se chargeant de pousser le tarif vers le haut, jusqu’à la stratosphère lorsqu’il s’agit de Missao, vin élaboré avec les très très petits rendements d’une vigne aussi ancienne que préphylloxérique. Heureusement, il y a moyen de se familiariser avec le style du Domaine à des conditions plus aimables. Je présente donc avec plaisir ce DNMC 2019, blanc sec issu à 80% du bical, complété par 20% d’arinto. Le nom de la cuvée peut sembler obscur, mais rajoutez les voyelles et vous formez Dinamica, ce qui est franchement plus digeste.

J’entends au loin l’une ou l’autre langue de vipère qui souligne qu’il ne s’agirait que d’un vin de négoce, les raisins étant achetés par Filipa à des vignerons habitués à fournir la coopérative. C’est exact. Mais voici ma botte secrète: Filipa est particulièrement reconnue pour sa capacité à flairer les meilleurs parcelles de la région: elle contacte les propriétaires et leur propose un contrat: elle paie les raisins plus chers que la coopérative, mais décide à 100% ce qui se fait à la vigne. Et toc.

En dégustation, ce vin est rusé. J’en connais beaucoup des jus qui racontent ce qu’ils ont à dire en quelques instants et deux gorgées. C’est d’ailleurs le principe de la dégustation. Mais il arrive que le vin se cache, se camoufle, joue avec le goûteur et le mène en bateau. Il ne se donne que petit à petit. Dans ce cas, il faut bien admettre qu’une rapide dégustation ne conduit nulle part, si ce n’est dans les marais brumeux de l’ignorance et de la confusion. Or, j’ai goûté Dinamica en trois fois et je compte bien, dès l’apéro de ce soir, lui donner une quatrième opportunité de me révéler d’éventuelles nouvelles facettes.

Je m’égare. Ma première perception m’emmène sur le terrain de la bière blanche et du pamplemousse, avec beaucoup de fraîcheur, des arômes fermentaires et une désaltérante pointe d’amertume. Quelque chose me dit que c’est fort peu sulfité (exact: 22 mg/litre). C’est énergique, plutôt direct, un peu fermé, avec un facteur « glouglou » plus élevé que la moyenne. C’est déjà une bonne note. MAIS, cela s’ouvre progressivement vers des arômes complexes (abricot/pêche, banane, zeste d’orange) et vers une vraie salinité, salivante, salutaire et si …saline.

Le lendemain midi, l’équilibre est plus classique, avec des arômes de poire et une très belle tenue à l’air (ce n’est donc pas un vin dont la « nature » obligerait l’amateur à le finir au plus vite, avant que l’oxygène ne le ravage).

Bref, coup de cœur. Et 12% d’alcool comme cerise sur le gâteau. C’est plus un vin pour le printemps et l’été que pour l’hiver. On peut le garder quelques années, mais ça ne me parait pas indispensable.

Filipa Pato & William Wouters, Bairrada Dinamica 2019 (bical, arinto) est disponible pour commande dans le magasin.

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Lave

Un vin 100% volcan: les Açores, c’est d’abord l’Océan Atlantique et c’est surtout le Vulcão do Pico, 2351 mètres de basalte et de magma. Cela en fait le point culminant du Portugal.

Dernière éruption: décembre 1720. Le volcan est donc endormi. Où est-ce une longue sieste ?

Les sols d’origine volcanique ont la réputation de donner naissance à des vins de grande intensité et de grande complexité. Les vignes plantées au plus près de l’océan ont la réputation d’absorber les embruns et de traduire cette proximité par des notes salines, voire iodées. Ce Terras de Lava 2019 cumule donc le volcan et l’océan.

Les cépages sont locaux et donc peu connus dans nos contrées: arinto, fernão pires, verdejo. Celui qui se dit maintenant, « le verdejo, je connais, c’est le cépage de Rueda, en Espagne » a malheureusement perdu. Celui-ci est un synonyme, génétiquement différent de son faux-frère castillan. A rapprocher plutôt du verdelho de Madère. Et encore, ce n’est pas certain.

Voici un donc un vin blanc sec, avec peu d’alcool (12,5%), une pincée de sucre résiduel (un peu plus de 2 grammes) et une acidité analytiquement fort élevée (cela gomme totalement le sucre dans l’équilibre perçu).

En dégustation, c’est un OVNI: il commence dans la rondeur et finit « en pointe ». Aromatiquement, il pourrait évoquer le viognier, avec des notes de pêche et de fleurs. Sauf que la grande fraîcheur de ce vin est aux antipodes de bien des viogniers ! La salinité finale est majeure, comme dans une manzanilla de Jerez. Il me semble percevoir une légère note oxydative, qui confirmerait une parenté aromatique avec la manzanilla. Par contre, je n’ai pas repéré de note iodée.

Je souligne volontiers que le prix de ce vin le rend encore plus attractif: les vins des Açores sont généralement bien plus chers.

Ilha do Pico Terras de Lava 2019 est disponible dans le magasin.

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Granit

Vraiment l’extrême nord du Portugal: jetez ici un caillou de l’autre côté de la rivière Minho …et il retombe en Espagne !

Le Domaine Soalheiro est en quelque sorte l’inventeur du Vinho Verde moderne, puisque il a planté le premier vignoble d’alvarinho en 1974. Alvarinho & albariño, même combat, même cépage: l’extrême nord du Portugal, c’est presque la Galice.

Depuis, une deuxième génération a pris les rennes du Domaine et propose pas moins de 12 cuvées élaborées à partir d’alvarinho, y compris des versions sans soufre ajouté, avec élevage en bois de châtaignier, en assemblage avec du pinot noir et en version effervescente ! J’allais oublier la version distillée…

Beaucoup de respect pour cette créativité débridée, mais j’ai préféré me focaliser sur la cuvée Granit, issue de vignobles en altitude (+/- 300 mètres). Vinho Verde ne veut en effet pas dire « bord de mer »: comptez une heure de route avant de voir l’Atlantique. Le climat fait alterner journées chaudes et nuits froides, ce qui est bénéfique pour conserver une belle fraîcheur dans les vins.

Cette cuvée affiche clairement une volonté de mettre en évidence le terroir granitique, sans en rajouter via un élevage sophistiqué: pas de bois, 100% cuve inox. Le Domaine insiste sur la possibilité de garder ce vin en cave pendant de très longues années: jusqu’en 2035 pour ce millésime 2019 ! J’ai été un peu plus prudent en affichant une fenêtre de dégustation optimale entre 2021 et 2029. Je compte bien en enterrer quelques unes pour vérifier.

En dégustation, le nez est intense, ouvert et appétissant, sur l’ananas. La bouche est élégante, fruitée, fraîche mais pas vive: il y a une certaine richesse, avec de la concentration. Pour rester dans l’albariño, c’est plus proche du style Pazo de Señorans que du style Leirana. Le vin est éclatant et aromatique. Je perçois des similitudes avec un Jurançon sec. La finale est sèche, tranchante, citronnée et pierreuse, avec une belle longueur …granitique !

Soalheiro Vinho Verde Granit 2019 (100% alvarinho) est disponible dans le magasin.

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Schiste

« 9 mois d’hiver, 3 mois d’enfer » est un dicton qui résume la météo de la vallée du Douro, dans le nord du Portugal. C’est une terre extrême, bien connue pour être créatrice du Porto. Le style des rouges « non-Porto » de cette région est habituellement marqué par une certaine chaleur qui se mesure au travers de pourcentages alcooliques élevés, entre 14 et 15%, voire plus. Lorsque le vin est boisé et fortement extrait, le dégustateur peut se retrouver en face d’un véritable Porto sec, à l’équilibre fatigant. La première gorgée est énorme, impressionnante, mais la bouteille a bien du mal à se vider.

Lorsque l’objectif est d’élaborer un vin sec, le vinificateur est confronté à une équation simple: le degré alcoolique du vin est un équivalent du sucre contenu dans le raisin au moment de la vendange. Pour le dire autrement, chaque pourcent d’alcool est la résultante de +/- 17 grammes de sucre par litre de jus. Par exemple, un vin sec qui titre 13% est le fruit (sic) d’un jus de raisin contenant approximativement 221 grammes de sucre par litre.

La quantité de sucre présente dans un raisin lors de la vendange dépend de nombreux facteurs: l’ensoleillement, le cépage, la surface foliaire (plus il y a de feuilles, plus il y a de photosynthèse, plus il y a du sucre), etc…La date à laquelle une parcelle est vendangée dépend d’équilibres complexes: maturité du fruit, maturité des pépins et des peaux, niveau des acides, météo, etc… Cette date est fonction de décisions prises par le vigneron, sur base de mesures et d’une solide dose d’intuition. Au pire, on vendange parce qu’ici on a toujours vendangé vers le 20 septembre: c’est évidemment plus facile à organiser, mais le résultat peut se révéler insatisfaisant.

Luis Seabra est assurément un homme de décisions: il sait ce qu’il veut et surtout ce qu’il ne veut pas. Pour éviter les alcools élevés, il va choisir les parcelles, les dates de vendanges et les techniques de vinification à sa façon. Pour résumer l’affaire crûment, ce Xisto Illimitado titre 12%. C’est vraiment -très- peu dans le Douro.

Ce Xisto Ilimitado ne ressemble donc pas beaucoup à ses cousins: le fruit se soumet à la minéralité. Un tel vin peut surprendre, voire décontenancer. On est sur le terrain de la haute-couture, qui ne s’embarrasse pas d’études de marché, lesquelles sont bien utiles pour le prêt-à-porter.

En dégustation, le vin présente un profil assez sévère. Le nez combine habilement des notes pierreuses et torréfiées (pourtant il ne s’agit pas de bois neuf: l’élevage est réalisé partiellement en fûts de chêne usagés et partiellement en inox), la bouche fait preuve de beaucoup de finesse, dans un univers qui me fait penser au cabernet franc de Loire ou à la mencia espagnole. L’acidité est plutôt élevée. Il y a de la terre, de la pierre et de la fumée. Tannins élégants. Le végétal joue un rôle non négligeable, en particulier à cause d’une vinification en vendange entière, c’est-à-dire conservant tout ou partie des rafles du raisin. Ces rafles macèrent dans le jus, en compagnie des peaux et des pépins et contribuent ainsi à la structure et à l’aromatique du vin.

La longueur du vin, sa persistance aromatique, est absolument remarquable et signe la qualité des terroirs de schiste (xisto = schiste) traduits dans cette bouteille. Ce vin parle certes à voix basse, mais qui l’écoute avec attention vit un moment de grande intensité.

Je n’ai pas encore évoqué les cépages, mais la liste est longue: touriga franca, tinta roriz (tempranillo en Espagne) et tinta amarela jouent les premiers rôles: ensemble, ils représentent 70% de l’assemblage. Celui-ci est complété par rufete, tinta barroca, malvasia preta et donzelinho tinto. Les vignes sont relativement jeunes et proviennent essentiellement des communes de Covas do Douro, juste en aval du village de Pinhão et de Ervedosa do Douro, en amont de Pinhão.

Le vin est très peu sulfité, mais ne présente absolument aucune déviation aromatique: c’est du travail de précision.

Le schiste est partout…

Si vous êtes à la recherche d’un vin à forte personnalité, qui ne laissera personne indifférent, Ce Xisto Ilimitado est un très bon candidat. Je pense que le vin suscitera beaucoup de sympathie …et quelques détracteurs. En tous cas, la conversation sera animée ! Je recommande vivement un passage par la carafe. Ne pas servir trop frais, sans quoi le vin pourrait se durcir.

Ah oui, Luis Seabra ne vient pas de sortir de l’anonymat: il a créé son Domaine en 2012, après avoir été le vinificateur de Dirk Niepoort pendant une dizaine d’années: un sacré diplôme !

Luis Seabra, Douro, Xisto Ilimitado 2018 est disponible dans le magasin.

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Quinta Nova: ce n’est pas toujours du Porto

La Quinta Nova de Nossa Senhora do Carmo se situe sur le fleuve Douro, très en amont de Porto et en direction de la frontière espagnole (à partir de laquelle le Douro se mue en Duero). Nous sommes donc en pleine région du Porto. Ce Porto (ruby ou tawny, vintage ou colheita) jouissait jusque vers 1990 d’un quasi monopole. Autrement dit, on ne produisait presque pas de vins non-mutés dans la région, tous les raisins servant à faire du Porto, pour le meilleur …et pour le pire.

Dirk Niepoort (encore lui …il est décidément dans tous les coups) a été l’un des premiers à percevoir que le marché du Porto était plutôt sur le déclin et qu’il était grand temps d’utiliser les magnifiques terroirs de schiste du Douro pour élaborer de grands vins rouges secs, non-mutés à l’alcool.

Le Douro, comme le Dão plus au sud, est un paradis pour les amateurs de cépages autochtones: touriga nacional, tinta roriz, tinto cão, touriga franca, tinta barroca, tinta francisca, tinta amarela, etc… Autochtones, quoique tinta roriz soit en fait un synonyme du tempranillo espagnol. Historiquement, les parcelles étaient plantées en foule, c’est-à-dire sans être alignées en rangs et en complantation, c’est-à-dire en mélangeant différents cépages sur la même parcelle.

La Quinta Nova fait partie du groupe Amorim, connu en particulier pour être le premier producteur mondial de liège. Le roi du bouchon a produit 5,5 milliards de pièces en 2019 !

Le Domaine produit bien entendu du vin, mais propose également une offre oenotouristique très complète: restaurant réputé (Conceitus), chambres « chic », promenades en bateau sur le fleuve, etc…

En dégustation, le vin présente une couleur plutôt sombre et jeune. Le nez confirme la jeunesse et l’absence de tout élevage en bois: du fruit et encore du fruit ! Cerise et prune. La bouche est équilibrée, succulente, juteuse et assez « punchy ». Quelques bons petits tannins, sans trace d’amertume.

Le point-clé pour un rouge sec du Douro: comment l’alcool est-il géré ? De nombreux vins issus de cette région particulièrement chaude sont en effet dévalorisés par une sensation brûlante et une excessive chaleur en bouche. Cette cuvée « unoaked » résout ce problème potentiel avec talent. Bien sûr, c’est un vin solaire qui ne peut cacher son origine: assez puissant, grâce à la matière mais aussi grâce aux 14% d’alcool. Cette solarité est néanmoins très bien cadrée, maîtrisée, intégrée dans le fruit, évitant ainsi toute lourdeur.

La bouteille est un bel objet. L’étiquette liste les quatre cépages présents dans cette bouteille. Mon seul regret concerne le nom donné à la cuvée: ce « unoaked » qui qualifie le vin, en anglais, par ce qu’il n’est pas, c’est un peu tristounet. Disons néanmoins que c’est clair, dans un pays où la plupart des vins rouges sont élevés sous bois.

Quinta Nova « unoaked » 2018 est arrivé dans le magasin.

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Dão Niepoort: classique et d’excellent rapport QP

Niepoort, Dão Rotulo 2016

Dirk Niepoort est un homme de multiples projets. Au Portugal bien sûr, mais également en Espagne, en Autriche, en Allemagne, en Afrique du Sud, …Un vigneron vraiment « larger-than-life ». Il est loin le temps où la marque Niepoort était uniquement associée au Porto.

Rotulo incarne un projet dans la région du Dão: l’étiquette met d’ailleurs un énorme accent sur le nom de cette région, au point que le nom de la cuvée est relégué au verso. On ne voit que Dão !

Paradoxalement, je pense que le prix de ce vin pourrait le desservir: ses qualités gagneraient à être associées à un prix supérieur. La cohérence serait meilleure. Autrement dit, excellent rapport qualité-prix.

En dégustation, je suis frappé par l’équilibre classique de ce vin: finesse des tannins, fraîcheur sans forte « atlantité », parfaite intégration de l’alcool, transparence de l’élevage. Cela se boit très facilement et chaque gorgée génère un plaisir nouveau.

Si vous êtes à la recherche de quelque chose d’original, de très différent …non… pas ce Dão. Par contre, si vous cherchez le bon vin qui ne déplaira à personne tout en s’accommodant de bien des cuisines, c’est un billet gagnant !

On a affaire à de vieilles vignes (30 à 80 ans), plantées en altitude (600 mètres) dans une géologie granitique, typique de la région du Dão. Les vendanges sont manuelles, la fermentation et l’élevage s’effectuent en cuve-ciment (pas de bois).

On achète ce vin dans le magasin: Portugal, Dão, Niepoort Rotulo 2016

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Dirk Niepoort: le serial-vigneron

Une fois n’est pas coutume, voici deux vins lusophones. Donnons la parole au premier : « moi, Rotulo 2015, je suis un assemblage de trois cépages locaux, le touriga nacional, le jaen et l’alfrocheiro. En fait, comme je proviens de vieilles vignes complantées, il est vraisemblable que d’autres cépages entrent aussi dans ma composition.

Mon père spirituel s’appelle Dirk Niepoort, personnage ubiquiste, qui crée de nouveaux vins partout où il passe. Au Portugal, bien sûr, mais aussi en Espagne, en Autriche et jusqu’en Afrique du Sud.

Qui jette un œil à mon étiquette, verra s’y afficher d’abord et avant tout le nom de l’appellation dont je proviens : Dão, au centre du Portugal. Chez moi, c’est du granit et cela me distingue nettement de mes confrères Douro (schiste) et Bairrada (calcaire).

Je suis un vin sans prétention, traditionnel, frais, élevé 12 mois dans des cuves en ciment (pas de passage par le bois). Je suis copain avec tout le monde, de l’amateur exigeant comme du profane. Je me contente de 12,5% d’alcool, ce qui me distingue de la plupart de mes compatriotes.

Je suis tonique, énergique, juteux et bien pourvu en bons tannins. Je suis à point, mais il n’y a pas urgence à me tire-bouchonner.

Ah oui …on me dit que je suis vendu à un prix très agréable ».

Notre deuxième vin portugais est un autre rejeton de la grande famille de Dirk Niepoort, commercialisé sous le nom du Domaine dont il est issu, la Quinta de Baixo, en appellation Bairrada.

Cette appellation se situe à l’ouest du Dão, en direction de l’océan Atlantique, entre Coïmbra et Aveiro. Elle est sortie d’un relatif anonymat grâce à Luis Pato et à ses cuvées Vinha Formal, Vinha Pan et Vinha Barrosa dont les étiquettes sont illustrées par diverses sortes de canard (en portugais, canard se prononce pato).

Ce Lagar de Baixo 2015 sort de l’ordinaire et de tout ce que l’on croit savoir au sujet du vin portugais. Dirk Niepoort mise ici sur les caractéristiques du cépage baga : peu de couleur, peu d’alcool, beaucoup de fraîcheur, une solide volée de tannins un peu terreux. Et une grande capacité de vieillissement.

En dégustation, il m’a paru fascinant, à la fois tannique et léger, plutôt facile à boire et pourtant d’une personnalité bien trempée. Le bouquet est original, cerise et épices, avec des nuances végétales et de la cendre ainsi qu’une forte minéralité.

Sol calcaire, altitude au niveau de la mer, vignes de 20 ans, vendanges manuelles, élevage de 18 mois en foudres de 2.500 litres. Alcool : 11,5%.

Pour avoir ensuite goûté Poeirinho (la version vieilles vignes du baga, sauce Niepoort), il m’a semblé que Lagar de Baixo constituait un meilleur rapport qualité/prix, la différence de qualité entre ces deux superbes baga ne sautant pas au …nez.

En dégustation le samedi 08 février 2020.