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Vieux vin toi-même !

Je continue vaillamment à explorer les profondeurs de ma cave personnelle, laquelle a été -sans grande surprise- alimentée en vins importés par Anthocyane entre 2012 et 2015. Il m’arrive bien entendu de tomber sur une bouteille dont les caractéristiques sont celles du vin mourant (dixit Frank Zappa: « jazz is not dead, it just smells funny« ). Mais …

… en règle générale, cela penche bien plus vers la bonne surprise, vers le vin qui se révèle autrement, dans une phase avancée de son existence. Voici ce que cela donne en cette rentrée des classes: un Gaillac 2012 et un Moulin-à-Vent 2011.

Je vous l’assure, celle-là … je n’y croyais pas du tout ! Importé pendant le printemps 2013, ce Vin de France issu du vignoble de Gaillac (Sud-Ouest) s’était vendu avec beaucoup de modestie. Bref, un flop magistral, malgré un prix très légèrement inférieur à € 10. Par contre, le rouge Anthocyanes (sic) avait fait un triomphe, sur deux millésimes consécutifs.

Revenons-en à ce blanc sec en millésime 2012, élaboré avec le cépage mauzac. Lequel mauzac traîne une réputation, comment dire, de platitude ou, du moins, d’un manque chronique de vivacité. Cette absente vivacité susceptible d’être corrigée par la présence d’une amertume qui peut plaire ou déplaire en fonction de vos papilles.

Première gorgée: on retrouve des arômes nets de pomme cuite plutôt agréables, la finale étant par contre dominée par une amertume IPA (bière fortement houblonnée et par conséquent solidement amère). Oups, cela ne se présente pas bien. Or, comme si souvent, il suffit de faire preuve d’un peu de patience. On laisse une bouteille sans la cajoler, pendant plus de dix ans, couchée entre des consœurs avec lesquelles elle n’a pas forcément des affinités et on voudrait qu’elle soit réveillée, en pleine forme dans les cinq minutes qui suivent son ouverture (« plop » dit l’onomatopée). Franchement, c’est déraisonnable.

Après quelques minutes dans le verre, se réchauffant légèrement et aspirant l’air à pleins poumons, ce mauzac se met en place, harmonise ses composantes et intègre une toute petite amertume qui contribue à son équilibre. Est-ce plat ? Non, que non. Ce n’est évidemment pas un monstre de vivacité, mais cela n’empêche aucunement ce vin de donner du plaisir, sensuel en diable. Une gourmandise ! Il aurait été fort sot de le passer dans l’évier de la cuisine sous prétexte de son amertume initiale.

Le Domaine de Brin fait aujourd’hui partie des valeurs sûres à Gaillac. Damien Bonnet est toujours à la tête de ce Domaine. Le guide 2026 de la Revue du Vin de France lui attribue une étoile et note son Mauzac 2023 à 91/100.

Ah celle-ci m’interpellait parce que vinifiée (quasi) sans soufre. Du vin nature 13 ans après vendanges ? Philippe, fais attention, tu commences à perdre la tête ! Oui, mais c’est du Moulin-à-Vent (Beaujolais, 100% gamay) qui a la réputation de bien vieillir, surtout en millésime 2011.

Château des Bachelards, chez Lilian et Sophie Bauchet. Le Domaine a changé plusieurs fois de propriétaire. J’ai fini par perdre la trace de Lilian, à mon avis toujours actif dans le vin (nature) quelque part en Beaujolais.

« Replop » dit l’onomatopée. Cela embaume la cerise nordique, avec une petite acidité volatile. Je pense que l’œnologue orthodoxe fusille déjà ce vin, parce que l’acidité volatile est un vilain défaut: pour mon humble nez, c’est une simple touche de complexité supplémentaire. En bouche, c’est toujours fruité, très peu tannique, avec quelque chose du Pajottenland, tendance bière bruxelloise acide. En toute franchise, cette bouteille cumule quelques défauts, mais ces défauts -peu marqués- lui donnent de la personnalité et en révèlent le charme. Nous avons fini le flacon le sourire aux lèvres et c’était 24 heures après son ouverture. Donc même le deuxième soir, ça passe !

Anthocyane a vendu ce vin en 2013, au prix de € 14,00.

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blanc dégustation

On se voit samedi ?

J’espère avoir l’occasion de vous faire découvrir samedi la diversité des vins de Gaillac.

Blanc sec, blanc doux et même blanc ‘sous voile’ (les Jurassiques apprécieront), rouges de cépages méconnus (braucol, duras), irrésistible rosé tendre…

Une promenade dans le sud, à la même latitude qu’Avignon, avec le vent d’Autan pour remplacer le Mistral rhodanien.

Prenez votre élan, bondissez par dessus les Cévennes…et vous êtes dans le Languedoc: Carcassonne, Cabardès et Minervois.

Programme de la dégustation

Compte-rendu de ma visite au Domaine de Brin: ici.

Compte-rendu de ma visite chez Michel Issaly: ici.

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dégustation domaine vins

Domaine de Brin (Damien Bonnet)

Le fléchage pour arriver au Domaine est impeccable. Heureusement, parce que le GPS ne connaît ni le lieu, ni les routes qui y mènent. Il faut dire qu’on se sent loin de tout. Pourtant, quelques minutes plus tôt, je parcourais la place du village voisin, Villeneuve-sur-Vère: un lieu esthétiquement magique. Nous nous trouvons à quelques kilomètres d’Albi, dans le Tarn, en plein Sud-Ouest.

Une fois n’est pas coutume, j’arrive avec quelques minutes d’avance. Je suis accueilli par la tante de Damien Bonnet…et par le chat de la maison. J’en profite pour me balader dans les vignes.

Damien Bonnet est jeune, terriblement jeune du haut de mes 49 ans. Et il parle. Disons qu’il m’arrose d’idées, de passion et de réflexions pointues. Quelle énergie ! Comme me dira Michel Issaly lors de ma visite du lendemain: « avec Damien, les anciens ont intérêt à rester bien réveillés ! »

Il est vrai que son premier millésime (2008) a décroché une Médaille d’Or au concours de Gaillac. C’était pour se tester, pas vraiment pour le macaron. Premier essai et premier essai transformé. Depuis, Damien ne participe plus au concours: ce n’est pas plus son ‘truc’ que le mien…

Nous commençons par goûter à la cuve une nouveauté: un gamay pétillant rosé en méthode gaillacoise. Ça commence fort: une délicieuse friandise !

Dans un coin d’une autre cave, un petit fût. Y fermente un blanc, élaboré avec le cépage local ‘Loin de l’Oeil’ (si, si, c’est le nom d’un cépage). Raisins récoltés à 31° potentiels. Pour le dire autrement, si, en fin de fermentation, on se retrouve avec un vin titrant 10% d’alcool, il restera plus de 300 grammes de sucre résiduel par litre !

Au caveau, Damien m’explique qu’il travaille seul, avec l’aide d’un ouvrier 6 mois par an. Levures indigènes et vendanges manuelles. Très peu de soufre. A la vigne, cuivre, ‘poudrage’ …et c’est tout. Rendements très maîtrisés: de 20 à 35 hectolitres/hectare.

Le rosé ‘La Vie en Rosé’ 2012 vient d’être mis en bouteille: ça fera des ravages au jardin cet été ! Je préviens les puristes du rosé sec que celui-ci est tendre. Donc, un peu de sucre mais parfaitement équilibré par le fruit et la fraîcheur. Vendu sous ‘Vin de France’ parce que décidément trop rock ‘n’ roll pour l’appellation Gaillac…Cépages ? Gamay, duras et merlot.

Le Mauzac 2012 est un blanc sec à l’équilibre typique de son cépage: une pointe d’amertume soutient la bouche. Je sais…amertume…un mot dangereux quand on vend du vin. Et pourtant, ce sont les quatre saveurs fondamentales qui font le vin: douceur de l’alcool, acidité fraîche, minéralité saline et amers nobles…voilà le grand cocktail !

La cuvée ‘Pierres Blanches’ était malheureusement épuisée.

Le vignoble de Damien est plutôt axé sur les cépages rouges. Première cuvée, Vendemia 2010, assemblage de braucol (40%), de duras (30%) et de cabernet sauvignon (30%). Pas de passage en bois, 18 mois d’élevage en cuves et mise en bouteilles début février 2013. Poivre et épices. Commence ‘facile’, mais finit plus sérieux.

Ensuite…Anthocyanes 2011…D’accord, avec un tel nom de cuvée, je suis condamné à la subjectivité. C’est donc très bon mais  je n’oblige personne à me croire !  70% braucol et 30% syrah. Elevage en barriques de plusieurs vins. Tannins fins, salinité salivante. Brin de temps 2010, assemblage à parts égales de duras et de braucol, vignes de 30 ans, rendements de 20 hectolitres/hectare, élevage de 22 mois en barriques de plusieurs vins. Cuvée de garde: pour la goûtez dès aujourd’hui, un passage par la carafe est plus que recommandé !

Après, décollage pour la planète Mars. La cuvée liquoreuse ‘Loin de l’Oeil…encore plus doux’ 2011 porte ce nom étrange parce que Damien élabore une cuvée liquoreuse du même cépage, mais en plus ‘politiquement correct’. Attention, cet ‘encore plus doux‘ n’est disponible que sur prescription médicale et après rédaction d’un acte notarié me dégageant de toute responsabilité ! Trêve de plaisanterie, l’équilibre entre sucres ‘héneaurmes’ et acidité de très haut vol en fait une cuvée d’exception.

Reste un rosé liquoreux de cabernet sauvignon, intitulé, à très juste titre, Brin de Folie. J’ai failli vous le proposer, mais finalement j’ai préféré éviter l’internement psychiatrique…

Les vins du Domaine sont en dégustation le samedi 01 juin. Ils peuvent être commandés jusqu’au 04 juin inclus.

Plus d’information sur cette page.

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La Vigne en Foule

En salle, c’est Charlotte, la fille de Guillaume Salvan, chef étoilé à La Falaise (j’y reviendrai un de ces jours); en cuisine, c’est Julien Bourdariès.

La carte des vins est à pleurer de joie. L’assiette est haute en couleurs, vachement goûtue, terroiresque en diable, originale de l’entrée au dessert (ah le baba…).

C’est bien simple, nous y avons dîné un jeudi et nous sommes retourné le samedi ! Qu’est ce que vous attendez ?

…un détail, La Vigne en Foule, c’est en plein centre de Gaillac (Tarn). Juste un millier de petits kilomètres à partir de l’Atomium.

L’idée mériterait d’être réinterprétée partout dans le vignoble: cinq associés, trois vignerons, un distillateur et un chef. Bien sûr, tous les vins de Bernard Plageoles, de Michel Issaly et de Patrice Lescaret (Causse Marines) sont donc disponibles. Bien sûr les alcools exceptionnels de Laurent Cazottes sont donc disponibles (ah, le baba à la goutte de mauzac rose…). Mais pas que. Plein d’autres vins très bien choisis, du Sud-Ouest, de France, d’Italie, d’Espagne et d’ailleurs. Une vraie cave d’Ali-Baba à la goutte de mauzac rose…pouf-pouf.

Je scribouillais donc, avant d’être grossièrement interrompu par moi-même (*), au sujet d’un restaurant qui fait aussi caviste et où chaque assiette respire l’intérêt des associés pour les beaux accords. Service au diapason.

Le site Internet semble malheureusement HS.

La Vigne en Foule – 80 Place de la Libération – 81600 Gaillac – Tél +33 5 63 41 79 08.

(*) Pierre Desproges (1939-1988): étonnant, non ?