Aujourd’hui c’est Escherndorf, village situé entre le Main et le célèbre vignoble du Lump. Il y a la place pour une rue et une église. La rue, c’est la Bocksbeutelstrasse, laquelle peut concourir pour le titre de rue la plus vigneronne d’Allemagne: sur quelques dizaines de mètres se succèdent les Domaines Michaël Fröhlich, Egon Schäffer, Horst Sauer et Reiner Sauer (sans lien de parenté).

Après avoir beaucoup lu, je me décide à rendre visite au Domaine Rainer Sauer. Magnifique caveau moderne et accueil sympathique. 15 hectares dont 65% de silvaner. On commence avec la catégorie Gutswein qui correspond à peu près à la notion de vin de cépage: on recherche un fruit de qualité simple, sans l’intensité offerte par les meilleurs terroirs. Silvaner, riesling, müller-thurgau, tout cela est bien fait et tarifé agréablement: € 8.
Puis vient un Ortswein à savoir un vin de village: le silvaner Muschelkalk 2021 vaut très largement ses € 11, style parfaitement sec et 12% d’alcool, le saut qualitatif est évident, le fruit étant complété par une bonne dose de caillou.
On grimpe encore pour déguster un premier cru, à savoir le susmentionné Escherndorfer Lump dont la pente vertigineuse surplombe le caveau. Ce cru fait partie des meilleurs lieux-dits de Franconie, son histoire remonte au moins jusqu’au 17ème siècle. C’est un amphithéâtre, une pente convexe et brutale qui épouse un méandre du Main.
Ce cru de 37 hectares forme un demi-cercle orienté sud-est. L’altitude s’échelonne entre 190 et 270 mètres. Difficile de ne pas succomber au charme puissant d’un lieu aussi particulier. Tout en haut de la paroi, c’est le Vogelsburg. De là, on se rend bien compte de la majesté de ce vignoble.
Et donc nous goûtons deux millésimes successifs, 2020 et 2021 du silvaner Escherndorfer Lump Erste Lage: deux très bons vins, marqués par une franche salinité et par une colonne vertébrale acide de toute beauté. Léger avantage au 2021, plus énergique que le 2020 (du moins aujourd’hui).
Également en premier cru, une spécialité: Altfränkischer Satz 2020. Il s’agit d’un vin de type complantation (les anglophones diront field blend): trois cépages plantés ensemble sur la même parcelle et vendangés ensemble. En l’occurrence, riesling, silvaner et traminer (chacun un tiers). En dégustation et à ma surprise le côté très aromatique du traminer est masqué par un riesling dominant.
On termine par le grand cru Am Lumpen 1655, en cépage silvaner et en millésime 2019. Très sec, fermé sur lui-même, ce vin implore la patience de l’amateur. C’est trop tôt. Cette fois, il faut accepter de réfléchir en termes de potentiel. Aujourd’hui, les premiers crus donnent plus de satisfaction; dans quelques années, j’accepte volontiers de parier sur le grand cru !
Am Lumpen 1655 est une parcelle située au centre du Lump.


Promenade du jour au château de Hallburg: lieu idyllique voire paradisiaque. Vignes, prairies, châtaigniers en fleur, vaches brunes, silence à peine troublé par un merle et un coucou. Un lièvre sur un chemin. Par contre, balisage inexistant. Rien n’est décidément parfait…
