Lorsqu’il m’a vu apparaître, David Barrault prenait le thé sur sa terrasse, avec un copain. La soirée précédente avait été “studieuse”, vu le nombre de flacons posés sur la table. Flacons vides pour certains, un peu moins vides pour d’autres. Je commence donc la dégustation par quelques gouttes de La Moussière (Mellot) et d’un Pouilly-Fumé d’Alexandre Bain. Mas del Périé (Cahors) était vide, dommage, j’aurais goûté avec plaisir.
Le contact passe tout de suite. Le temps pour David de changer de chaussures et cap sur les vignes. Lieu magique, silence d’anthologie. Les épaules se détendent, la pression tombe, je respire.
Sols argilo-calcaires, avec épaisseur variable d’argile. Juillet a été chaud et très sec, la pluie de cette nuit était la bienvenue.
A coté de la maison, une très jeune vigne. Une sorte de jardin expérimental, avec du cabernet franc et du pineau d’Aunis. En septembre, David y plantera deux cépages locaux anciens, disparus depuis plusieurs dizaines d’années. J’avoue en avoir oublié les noms. Il se pourrait que l’un soit de la famille des mansengs, sans garantie.
Un tour dans le chai révèle des cuves béton, des cuves inox et des grosses barriques (300, 400, voire 600 litres). Quelques barriques vides, vu les faibles rendements de 2012 (le mildiou n’a pas épargné Tire-Pé).
Nous goûtons DieM 2012, 100% merlot joyeux, simple, croquant, fruité, précis et terriblement plaisant. Elevage 100% en cuve, mise en bouteilles en juillet.
Ce vin est élaboré à partir de raisins “Tire-Pé” et de raisins achetés à deux vignerons-voisins, de façon à pouvoir proposer un volume suffisant. Collaboration un peu particulière, à mi-chemin entre le fermage et le négoce: David vendange lui-même, mais les vignerons-voisins se chargent de tous les autres travaux de la vigne. Progressivement, ces vignerons-voisins évoluent vers le “bio”: une forme très concrète de prosélytisme.
Le Château Tire-Pé 2011 est tout autant 100% merlot. Pas de barriques. Tension dès l’attaque, beaucoup de fraîcheur jusqu’en finale. Un merlot avec une sacrée colonne vertébrale ! Du “peps”. Cela se goûte à la perfection, tout tombe juste, grand équilibre prêt à boire.
On en profite pour faire une pause architecturale: les étiquettes de Tire-Pé jouent avec des représentations d’un fer forgé de 1764, réalisée par un artisan réputé localement. Et voilà (la première partie de) la propriété datée !
La Côte 2010 est épuisée. Le millésime 2011 sera mis en bouteilles en septembre. Assemblage de 60% de merlot et de 40% de cabernet franc. Elevage d’un an en barriques de plusieurs vins, puis de 8 mois en cuve. Tous les cabernets francs de la propriété rentrent dans cette cuvée. Carafe ou quelques années de patience. Grosse matière, boisé discret. Un Bordeaux comme on en faisait il y a 25 ans.
Il y a un paquet d’années, Elian Da Ros (vigneron dans le Marmandais) était venu goûter les vins de Tire-Pé: “Faut que t’arrêtes avec tes charpentiers” avait été son commentaire. David estime qu’Elian lui a rendu ce jour-là un énorme service. Les charpentiers ont été virés, les barriques sont aujourd’hui sélectionnées avec minutie. Chaque barrique d’un même vin est régulièrement goûtée, à l’aveugle.
Tiens, la pluie se remet à tomber. David me raconte la triste histoire d’un vigneron qui a décidé de s’arrêter: 48 hectares ont été grêlés à 100%. Un désastre, bois éclatés, plus de feuilles. 9 minutes de grêle et tout est fini. David, lui, est assuré.
Les Malbecs 2010 est en bouteilles depuis juin 2013. Vignes de 10 ans. Quelle aromatique ! Superbe jus floral et poivré. Au nez, on pourrait penser à une syrah. Aucune dureté, pas de rusticité. C’est fin et déjà prêt à boire.
Ces vins sont en dégustation le 24 août. Ils peuvent être commandés via ce tarif & bon de commande.