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Oremus Mandolas: un sec au pays des terriblement doux

C’est lors d’une dégustation de vins espagnols que mes papilles ont croisé un vin hongrois. Logique bancale sauf à considérer que le propriétaire du vignoble hongrois serait un Domaine espagnol. Ainsi soit-il, voici l’histoire.

Vega-Sicilia est une institution de majeure magnitude. De fait, c’est sans doute LE Domaine hispanique qui domine tous les autres en termes de notoriété. C’est un mythe. Donc on en boit peu et on fantasme beaucoup.

Leur gamme actuelle est assez large: Alion, Valbuena, Pintia, Macan, Vega Sicilia Unico et, au sommet de la pyramide, Vega Sicilia Unico Reserva Especial, assemblage de trois millésimes, commercialisé lorsque le millésime le plus récent a passé le cap des dix ans. Ainsi, l’édition 2019 de la Reserva Especial assemble les millésimes 2006, 2007 et 2009: si vous en voulez une bouteille, il n’y a qu’à demander …et à préparer € 430. Rassurez-vous, c’est TVA comprise…

Revenons à nos moutons magyars. En 1993, peu de temps après la chute du communisme, la famille Alvarez, propriétaire de Vega-Sicilia, se dit qu’il y a une formidable opportunité à saisir: les vins doux de la région volcanique de Tokaj (nord-est de la Hongrie, dans le cercle rouge sur la carte) sont célèbres depuis des siècles et les vignobles, ex-propriétés de l’état hongrois, sont à vendre.

Une centaine d’hectares sont acquis, situés sur une douzaine de lieux-dits qualitatifs parmi lesquels Deák, Henye, Cziróka, Gyopáros, Mandulás, Szentvér, Kútpatka et Oremus qui donne son nom au projet hongrois de Vega-Sicilia.

La tradition locale se fonde presque exclusivement sur les vins doux, voire terriblement doux : l’Eszencia est une boisson de l’extrême, avec 3% d’alcool et (beaucoup) plus de 500 grammes de sucre résiduel par litre. L’équilibre fonctionne grâce à une acidité très élevée qui contre l’archi-richesse en sucre. A mon grand regret, je n’y ai jamais goûté, le prix étant dissuasif.

Vega-Sicilia-Oremus va faire croître et embellir la gamme des vins doux, puis y ajouter un premier blanc sec : Mandolas.

Ce Tokaji Mandolas 2017 (la région, c’est Tokaj ; le vin, c’est Tokaji) est issu pour l’essentiel de la parcelle éponyme et se compose exclusivement de raisins du cépage furmint. La fermentation et l’élevage se font en fûts. Le bois utilisé est local : il provient de la forêt de Zemplen, à la frontière slovaque. Les fûts ont une capacité de 136 litres, selon la tradition toute aussi locale.

Robe pâle, avec de petits reflets verts. Le nez est intense et traduit l’élevage en fûts avec subtilité. Il y a quelque de chose de chablisien dans l’équilibre, entre fraîcheur et minéralité. Le vin est réservé, pas exubérant, plutôt délicat, clairement à l’aube de son évolution. Alcool : 13%. Agriculture biologique (non revendiquée).

Ce vin a la réputation d’évoluer progressivement vers des arômes miellés et de vieillir magnifiquement. Une dégustation en 2020 appelle, avec force, le passage en carafe.

La revue belge In Vino Veritas a consacré un bel article à Oremus et Mandolas, que vous pouvez consulter ici.

En dégustation la samedi 08 février 2020

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